LE CHEMINEMENT DU FRANÇAIS EN LOUISIANE : CULTURE ET IDENTITÉ

Au crépuscule de la décennie 1960-70, la Louisiane promulgue des lois visant la création de programmes destinés à développer et préserver la langue française sur son territoire. En 1983, Dorais constate « un regain d’intérêt pour la culture traditionnelle », mais souligne l’incongruité, aux yeux des Québécois, de la croyance de plusieurs Cajuns à l’effet qu’ils peuvent « conserver leur identité spécifique » sans pour autant parler français[i]. Une cinquantaine d’années après l’implantation des changements instaurés par l’État, nous sommes maintenant en mesure d’en apprécier les effets. Nous allons d’abord revenir sur l’histoire du français en Louisiane en examinant brièvement les modifications pertinentes faites à sa constitution au cours des années, ainsi que la persistance de son Code civil d’origine française. Nous discuterons ensuite de l’éveil de la population louisianaise à la culture francophone au milieu du XXe siècle, encouragé par des organismes gouvernementaux, tel CODOFIL, et soutenu par des partenaires internationaux. Nous verrons ensuite comment, au XXIe siècle, propulsé par l’explosion des moyens de communication et une recrudescence de l’enseignement du français en immersion, la langue et la culture francophone ont continué de progresser. Enfin, nous examinerons les données du recensement à propos de la langue parlée à la maison en Louisiane et dans les paroisses francophones et tenterons de tirer des conclusions quant à la langue, la culture et l’identité de la population cadienne.       

XVII-XX siècle : le choc des langues

Le français René Robert Cavelier, Sieur de La Salle, prit possession du territoire qu’il nomma « Louisiane » en 1682, en honneur de Louis XIV, roi de France. En 1717, un gouvernement civil est établi et le droit civil français codifié est appliqué dans la colonie[ii].

À la fin de la guerre de Sept Ans (1763), la colonie française est cédée à l’Espagne par le Traité de Paris. Le régime espagnol, qui comporte certaines similitudes avec le système français (religion, culture, lois), se fait sans heurts sur le territoire et n’empêche pas la progression du français[iii]. Une quarantaine d’années plus tard, entre 1800 et 1803, l’Espagne accepte de retourner la Louisiane à la France, qui la vend alors aux États-Unis. La nouvelle acquisition des Américains formera le « Territory of Orleans ».

En 1812, le territoire devient officiellement le dix-huitième État. La nouvelle constitution de l’État, écrite en français et traduite en anglais (une condition d’accession à l’Union), et ses nombreuses modifications au cours des années qui suivront auront une influence importante sur le statut du français[iv]. Fortement francophone au moment d’accéder au statut d’État, la Louisiane est incapable, malgré ses efforts, de maintenir cette position dominante. Rapidement, l’État est envahi par une population anglo-américaine qui, dès 1845, vise à prendre un contrôle plus important sur les affaires de l’État. Vingt ans plus tard, cette domination anglophone se traduit par des changements drastiques dans la constitution de 1868 : l’enseignement devra se faire en anglais seulement et les lois ne seront promulguées qu’en anglais. Une quinzaine d’années s’écouleront avant de voir des assouplissements et le retour d’une forme d’enseignement en français à certains endroits où le français prédomine, assouplissements qui s’étendront quelque peu dans la constitution de 1898. Malheureusement, le français est déjà très affaibli. Tellement qu’on ne voit plus la nécessité, dans la constitution de 1921, d’y accorder une importance particulière. L’anglais devient la langue unique d’enseignement. Vers la fin des années 1960, un mouvement en faveur de la réintroduction du français renait, ce qui mène à l’ajout d’un énoncé général dans la constitution de 1974, mais le français n’y est pas mentionné explicitement. On reconnait tout au plus le droit du peuple de préserver et promouvoir ses origines linguistiques et culturelles historiques. Les langues autres que l’anglais sont traitées comme d’anciennes pièces de monnaie : on reconnait leur valeur, mais elles n’ont plus cours légal.

Malgré l’affaiblissement généralisé du français au profit des Anglo-américains, il faut noter que la Louisiane a su conserver son Code civil. La version de 1825, écrite en français, puis traduite en anglais, a fait l’objet de vives critiques de la part de la Cour suprême de la Louisiane pour la piètre qualité de la traduction, au point où tout conflit entre les deux versions sera tranché en faveur de la version française. Il est remarquable que cet état de choses se soit maintenu même après la publication (en anglais seulement, en conformité avec la constitution de 1868) du Code civil révisé de 1870, cela pour les articles n’ayant pas fait l’objet d’une révision[v]. Les cours continuent donc de faire appel à la version française de 1825 dans l’interprétation de la loi : « Therefore, although the corpus of the French language has long since disintegrated, its spirituscontinues to haunt Louisiana law[vi]. »

Cette période est constituée de hauts et de bas dans la lutte pour le maintien de la langue autrefois majoritaire. Malgré les efforts déployés, l’élimination de l’enseignement du français en 1921 aura un impact important sur les générations suivantes et leur capacité à freiner le déclin inéluctable qu’une telle décision entraine.     

Fin XXe siècle : l’éveil à la culture

Le Conseil pour le développement du français en Louisiane (CODOFIL), un organisme gouvernemental fondé en 1968 (Acte 409), est chargé de la difficile tâche de développer et préserver la langue française en Louisiane[vii]. Les interventions sont concentrées à l’intérieur d’un triangle composé de 22 paroisses formant la région « Acadiana », ainsi nommée en 1971 (résolution 496) pour souligner l’important héritage cadien et acadien de la région[viii].

Au même moment (1968), l’assemblée législative mandate l’enseignement de la langue et de la culture française dans les écoles primaires et secondaires[ix].

En 1991, Jacques Henry (directeur du CODOFIL) dresse un portrait sommaire des résultats de l’organisme après deux décennies d’existence[x]. Les deux principaux créneaux d’intervention sont l’éducation et les communications. L’enseignement du français, langue seconde, dans les écoles primaires profite alors à 64 000 élèves. Près des deux tiers des professeurs sont louisianais, alors qu’auparavant la majorité venait de l’étranger (France, Belgique, Québec, Acadie). La culture francophone s’épanouit : écrivains, musiciens, acteurs et autres artistes font leur marque. L’arrivée de TV5 et de journaux, comme La gazette de Louisiane[xi] permet d’implanter le français dans l’univers médiatique local. 

Il nous faut souligner ici l’apport du Québec et de l’Acadie dans cette résurgence du français[xii]. Dès la formation de CODOFIL, un accord culturel est signé avec le Québec, qui établit un bureau à Lafayette en 1971. Des enseignants sont envoyés et des échanges d’élèves prennent place. La signature d’un accord culturel avec les Maritimes en 1992 déplace le point de mire vers l’Acadie, ce qui renforce « la baisse d’importance du critère linguistique dans la définition de l’identité cadienne et le glissement vers une définition historico-culturelle »[xiii]. Les Congrès mondiaux acadiens (le premier en 1994 au Nouveau-Brunswick ; le second en Louisiane en 1999) sont des occasions pour la famille acadienne de se réunir[xiv].

Cette période est caractérisée par une prise de conscience sociale de l’importance de préserver la langue et la culture francophone : « Le statut du français louisianais est en train de passer rapidement d’une langue à réprimer à une langue dont on est fier »[xv]. Ce désir de préserver la culture francophone est encouragé par des initiatives du gouvernement louisianais qui, au-delà de la culture, y voit des avantages économiques. L’attrait de cet état pour les nombreux visiteurs qui y séjournent réside précisément dans son unique héritage culturel.  

XXIe siècle : le boom culturel francophone

L’Assemblée législative de la Louisiane continue de manifester son appui en faveur du développement du français. Le paragraphe 671.1 de la loi 106 de 2011 est remarquable : « The heritage of the French-speaking people of Louisiana is one of the greatest treasures of Louisiana’s rich cultural patrimony and perhaps the most significant factor in making the state’s culture unique »[xvi]. Cette entrée en matière est suivie d’une description de l’impact économique important des francophones qui habitent et visitent l’État, le tout pour justifier l’instauration d’un programme visant à fournir des services gouvernementaux en français.

En 2012, lors d’une révision de la loi encadrant le CODOFIL, on ajoute l’exigence d’implanter une école d’immersion française dans vingt-deux paroisses de la région d’Acadiana[xvii]. Ces programmes d’immersion (au nombre de 4 en 1991), décrits en détail dans un guide produit par CODOFIL[xviii], sont la pierre angulaire de la stratégie de francisation. Parmi les 160 écoles offrant un programme d’immersion en français aux États-Unis, la Louisiane se classe première en 2019 avec plus de 30 programmes[xix]. Malgré certains problèmes inhérents à ces programmes d’immersion, qui peuvent mener à un retrait de certains étudiants, une étude en 2011 conclut à un succès impressionnant pour ceux qui persistent[xx].  

La Louisiane adhère à l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) depuis 2018, en qualité d’observateur. Dans son rapport 2019 sur la langue française dans le monde, l’OIF indique que « l’enseignement bilingue connait un engouement sans précédent »[xxi] aux États-Unis, surtout en anglais/espagnol, anglais/français et anglais/chinois. Il est mentionné que la Louisiane et l’Utah font particulièrement bonne figure dans ce domaine.

Le développement fulgurant de l’internet depuis le début du siècle a permis à de petits joueurs francophones de se tailler une place dans le monde des médias, à travers des blogues, balados, et la diffusion en ligne de contenus variés[xxii]. Un exemple probant est la création de Télé-Louisiane, une chaine francophone qui s’affiche d’une façon on ne peut plus colorée : « Télé-Louisiane. Icitte. Asteur. Ensemble. ». Particulièrement notable, la chaine produit et diffuse depuis peu une série de dessins animés destinés aux jeunes Louisianais[xxiii].    

Les données du recensement[xxiv] nous informent à propos du nombre de locuteurs âgés de 5 ans et plus parlant le français à la maison dans l’état de la Louisiane. L’espagnol est inclus pour fin de comparaison.

Il apparait clairement que le français est en rapide déclin, et cède maintenant sa place à l’espagnol comme langue d’usage, après l’anglais. Voici les mêmes données en ce qui concerne le poids de la langue dans l’État.

Ces faibles pourcentages en ce qui concerne l’État ne reflètent pas bien la situation du français dans la région d’Acadiana, où la majorité des francophones se trouvent. Voici une comparaison des données de 2000 et 2010 dans cinq paroisses ayant un pourcentage élevé de francophones[xxv].

On constate une baisse importante du poids du français entre 2000 et 2010. Aucune paroisse ne dépasse maintenant les 20 % de francophones. De gauche à droite, les paroisses sont représentées du nord au sud : Avoyelles, au sommet du triangle d’Acadiana ; Vermillon/Lafourche adjacentes au golfe du Mexique. On note que le nombre de locuteurs accuse une baisse de plus de 30 % au nord, mais que cette baisse diminue fortement lorsqu’on se dirige vers le sud.

Ces données ne comptabilisent pas ceux qui maitrisent la langue française comme langue seconde, sans pour autant parler la langue à la maison. Un récent reportage de TV5Monde laisse entendre qu’il y aurait plus de 250 000 « francophones » en Louisiane aujourd’hui, une augmentation de 25 % en vingt ans[xxvi]. Cela tend à démontrer que même si le français est en constant déclin comme langue d’usage dans les foyers, les efforts des dernières décennies ont largement contribué à augmenter sa présence comme langue seconde.

Cette dichotomie entre la diminution du nombre de locuteurs parlant la langue à la maison et l’augmentation du nombre de ceux qui arrivent à la maitriser n’est pas sans conséquence. Chaque peuple possède un caractère distinct, une manière d’être et de réagir qui définit son identité. L’identité d’un peuple s’exprime de façon unique par ses structures sociales et sa culture. Un aspect important dans l’expression de cette culture est la langue, façonnée par l’usage de façon à refléter les exigences et aspirations de ce peuple. La langue parlée à la maison est généralement le véhicule utilisé pour exprimer ce caractère identitaire de la culture. Comme le dit le fier cadien francophone Jourdan Thibodeaux dans un excellent reportage de France24 : « Je crois que le plus important c’est la langue, que sans ça on n’a rien »[xxvii]. Nous pouvons contraster ce témoignage avec celui de cette jeune femme qui assiste au petit déjeuner hebdomadaire en français dans un restaurant local de Lafayette, dans un effort pour raviver la langue de ses ancêtres « parce que mes arrière-grands-parents parlaient français, mes grands-parents, mes parents ne parlent pas français »[xxviii]. Dans ce cas, il s’agit d’une démarche intellectuelle en faveur de la connaissance de la langue française et de la culture francophone. Ce type de démarche, qui a pris de l’ampleur au cours des dernières décennies, semble porter ses fruits, mais cette langue à laquelle on donne un second souffle exprime de moins en moins le caractère identitaire de ses locuteurs pour qui ce n’est plus la langue d’usage dans les foyers. Elle permet par contre de reconnaitre et célébrer la culture francophone qui fait partie de l’héritage cadien. Dans un article de 1994, Étienne Balibar clarifie de façon remarquable les notions complexes de culture et d’identité des peuples[xxix].     

Il est difficile de prévoir avec certitude l’avenir du français en Louisiane. Le plein effet des programmes d’immersion, dont plusieurs sont relativement récents, prend un certain temps avant de se faire sentir. Par contre, si la tendance se maintient et si les autorités gouvernementales continuent leur support, l’État semble s’être engagé sur la bonne voie pour éviter la disparition de la langue, voire assurer sa progression comme langue seconde. Mais d’autres facteurs sont à considérer. Avec la diminution constante du poids du français comme langue parlée à la maison (et l’augmentation de l’espagnol), viendra-t-il un temps où les programmes d’immersion en français n’auront plus la cote ni le support des autorités gouvernementales ? Dans un autre ordre d’idée, les mouvements de populations en réponse aux changements climatiques ou autres désastres vont-ils influencer la présence francophone dans le sud de l’État ? Les changements climatiques se font déjà sentir et ce n’est que le début : augmentation de la fréquence et de l’intensité des tempêtes tropicales et ouragans ; hausse du niveau de la mer et ennoyage des côtes ; inondations ; et autres effets résultant de la hausse des températures[xxx]. Le sud de la Louisiane et le golfe adjacent sont truffés d’installations pétrolières (raffineries, plateformes, puits, pipelines, etc.)[xxxi] qui constituent une menace constante de catastrophes environnementales comme celle de l’explosion de la plateforme BP en 2010.    

Conclusion

Le cheminement du français en Louisiane nous force à nous poser des questions à propos du rôle culturel et identitaire joué par la langue. Fortement francophone au moment de son annexion aux États-Unis en 1812, l’État s’anglicise graduellement jusqu’à ce que l’anglais devienne la langue juridique et d’enseignement exclusive en 1921. En 1968, le gouvernement rétablit l’enseignement du français comme langue seconde et encourage le développement du français avec la création de CODOFIL. L’intérêt pour la langue et la culture francophone continue de progresser au XXIe siècle, aidé par l’explosion des moyens de communication et la popularité des programmes d’immersion. Même si ces résultats semblent prometteurs pour l’avenir, nous constatons une diminution constante du poids du français parlé à la maison, ce qui nous amène à conclure que bien que la connaissance de la langue et de la culture progresse, le français exprime de moins en moins le caractère identitaire de ses locuteurs. 


[i] Dorais, Louis-Jacques. La Louisiane, Québec français. 1983, No. 49, p.20-22. En ligne. [https://www.erudit.org/fr/revues/qf/1983-n49-qf1210776/55418ac.pdf]. Consulté le 20 juillet 2021.

[ii] Leclerc, Jacques. La colonie française de la Louisiane, section 3.1, En ligne.  [http://www.axl.cefan.ulaval.ca/francophonie/Nlle-France-Louisiane.htm] . Consulté le 23 juillet 2021. 

[iii] Ward, Roger K. The French Language in Louisiana Law and Legal Education: A Requiem, Louisiana Law Review Vol. 57 (1997), p. 1289, En ligne. [https://digitalcommons.law.lsu.edu/lalrev/vol57/iss4/7 ]. Consulté le 23 juillet 2021.

[iv] Ibid. p. 1291-1301

[v] Ibid. p. 1305-1306

[vi] Ibid. p. 1307

[vii] Louisiana Department of Culture. En ligne. [https://www.crt.state.la.us/cultural-development/codofil/about/index]. Consulté le 23 juillet 2021.

[viii] Acadiana Legislative Delegation. En ligne. [https://house.louisiana.gov/acadiana/]. Consulté le 23 juillet 2021.

[ix] Louisiana State Legislature, RS 17 :272. En ligne. [http://www.legis.la.gov/legis/Law.aspx?d=80397]. Consulté le 23 juillet 2021.

[x] Henry, Jacques. Le français en Louisiane : le doute, puis l’espoir, Bulletin de l’Assemblée parlementaire de la francophonie, Volume 1, Septembre 1991, Numéro 1. En ligne. [https://www.regionamerique-apf.org/Bulletin/Vol1No1/Art9.pdf]. Consulté le 23 juillet 2021.

[xi] Boudreaux, Rose-Marye. La gazette de Louisiane : un peu d’histoire, Bulletin de l’Assemblée parlementaire de la francophonie, Volume 7, Septembre 1997, Numéro 2. En ligne. [https://www.regionamerique-apf.org/bulletin/Vol7No2/art20.pdf]. Consulté le 23 juillet 2021.

[xii] Henry, Jacques. Réalignement francophone: les relations Louisiane-Québec-Acadie, Francophonie d’Amérique, (9), p 63-72. En ligne. [https://www.erudit.org/fr/revues/fa/1999-n9-fa1808597/1004956ar.pdf]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xiii] Ibid. p. 70

[xiv] La Société nationale de l’Acadie. Congrès Mondial Acadien. En ligne. [https://snacadie.org/nos-dossiers/promotion/congres-mondial-acadien]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xv] Brown B., Une remise en cause de la situation linguistique de la Louisiane française, Francophonies d’Amérique, 1993, (3), p. 177. En ligne. [https://www.erudit.org/en/journals/fa/1993-n3-fa1807525/1004457ar.pdf]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xvi] Act 106: Louisiana French Language Services. En ligne. [https://web.archive.org/web/20120331014149/http://latinlouisiana2010.wordpress.com/2011/07/04/act-106-louisiana-french-language-services/] . Consulté le 24 juillet 2021.

[xvii] Louisiana State Legislature, RS 25:651. En ligne. [https://legis.la.gov/Legis/Law.aspx?p=y&d=84519]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xviii] CODOFIL, French Immersion: A Guide for Creating a Successful Program, En ligne. [https://www.crt.state.la.us/Assets/OCD/codofil/Guide%20Immersion.pdf]

[xix] FrenchDLI.org, French Dual Language in the United States. En ligne. [https://sites.google.com/face-foundation.org/frenchdli/home]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xx] Nicole Boudreaux, Exploring French Immersion Student Attrition in Louisiana: Who Leaves, When, and Why?, American Council on Immersion Education (ACIE) Newsletter, May 2011, Vol. 14, No. 2. En ligne. [https://carla.umn.edu/immersion/acie/vol14/no2/may2011_rr.html]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xxi] Organisation internationale de la francophonie. La langue française dans le monde, Éditions Gallimard, 2019, p. 119. En ligne. [https://www.francophonie.org/sites/default/files/2020-02/Edition%202019%20La%20langue%20francaise%20dans%20le%20monde_VF%202020%20.pdf]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xxii] Le Courrier des Amériques, Louisiane : de nouveaux et très intéressants médias en français, 3 juin 2019. En ligne. [https://courrierdesameriques.com/2019/06/03/louisiane-de-nouveaux-et-tres-interessants-medias-en-francais/]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xxiii] Télé-Louisiane, Première des Aventures de Boudini et ses Amis : « Une Belle Journée de Pêche », 2021. En ligne. [https://www.youtube.com/watch?v=2zzGBKA1Wo8]. Consulté le 24 juillet 2021.

[xxiv] U.S. Census Bureau. En ligne. [https://data.census.gov/cedsci/table?g=0400000US22&tid=ACSDT1Y2019.B16001&q=ACSDT1Y2016.B16001]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxv] MLA Language Map Data Center. En ligne. [https://apps.mla.org/map_data]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxvi] Fried A., Francophonie: une chaine de télévision en français en Louisiane, TV5Monde, 13 mars 2021 En ligne. [https://information.tv5monde.com/video/francophonie-une-chaine-de-television-en-francais-en-louisiane]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxvii] France24, États-Unis: en Louisiane, avec les Cajuns qui veulent préserver leur identité. En ligne. [https://www.youtube.com/watch?v=ijL31NmPiKw]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxviii] Alex Décotte, Louisiane 2010 (5): Parler français. En ligne.

[https://www.youtube.com/watch?v=dYTqI7rF2ys]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxix] Balibar E., Identité Culturelle, identité nationale, Quaderni, 1994, (22), pp.53-65. En ligne. [https://www.persee.fr/doc/quad_0987-1381_1994_num_22_1_1062]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxx] U.S. Environmental Protection Agency, What Climate Change means to Louisiana, August 2016. En ligne. [https://19january2017snapshot.epa.gov/sites/production/files/2016-09/documents/climate-change-la.pdf]. Consulté le 25 juillet 2021.

[xxxi] ICF, The Economic Impact of the Oil and Natural Gas Industry in Louisiana, 2020. En ligne. [https://www.lmoga.com/assets/uploads/documents/LMOGA-ICF-Louisiana-Economic-Impact-Report-10.2020.pdf] . Consulté le 25 juillet 2021.

Où sont les gens rationnels?

Ces jours-ci, on parle beaucoup de la question du refus d’une transfusion sanguine pour des motifs religieux. Ceci à la suite de la mort d’une femme ayant refusé un tel traitement, que ne permettent pas les croyances des Témoins de Jéhovah. On se demande si une personne peut prendre une décision éclairée lorsqu’entourée de proches qui l’influencent à un moment où celle-ci se trouve dans un état affaibli.

Il est évident que la décision de recevoir ou non un traitement doit demeurer le choix du patient. On ne peut se substituer à sa volonté, même si la décision nous apparait fondée sur des considérations non rationnelles. Par contre, cela soulève une question que j’ai déjà abordée dans un message précédent.

Le problème dans le cas ci-haut est qu’il est trop tard pour intervenir. Il n’est plus le temps de convaincre une personne de changer ses croyances lorsque celle-ci se trouve à l’article de la mort. On fait face au même problème dans les cas de violence ou terrorisme fondés ou excusés par des croyances religieuses. La même chose encore lorsque certains refusent d’agir pour contrer le réchauffement climatique parce que le climat est sous le contrôle de Dieu, pas de l’homme.

Alors que dans tous les domaines (politique, économie, sciences), les gens rationnels n’hésitent pas à argumenter avec force lorsqu’ils se butent aux opinions de gens qui ignorent les faits, ces mêmes personnes sont très peu loquaces lorsqu’il s’agit de contrer les discours de ceux qui véhiculent des croyances religieuses qui n’ont aucun fondement. Et cela devient de plus en plus problématique. On entend des voix s’opposer aux religions que dans les cas extrêmes où on véhicule des idées menant à la violence.

Nous confondons respect des croyances religieuses avec respect des personnes pratiquant une religion.  On doit toujours respecter les personnes, quel que soit le domaine, religion ou autre, mais il n’existe aucune raison pour que les idées et croyances religieuses soient à l’abri de la critique. Lorsqu’on accepte sans aucune opposition toute sorte d’idées complètement farfelues parce qu’elles ne nous « dérangent pas » ou parce qu’il faut « respecter les religions », nous décourageons tacitement la pensée critique, basée sur une analyse des faits. Or la pensée critique est ce qu’il y a de plus important dans la société. Cela doit être la pierre angulaire de notre système d’éducation. On doit constamment relever et combattre (par l’éducation et la parole) dans le domaine public les croyances qui ne sont pas fondées sur des faits, et pas seulement les croyances qui risquent de causer la violence ou qui sont des éléments utilisés dans le recrutement d’éléments terroristes. Il faut être consistent dans notre approche.

On voit déjà dans plusieurs pays, incluant les États-Unis, comment la religion cause des distorsions importantes dans l’interprétation de la réalité par une partie importante de la population. Ici, on prône la neutralité religieuse de l’État. C’est insuffisant. Nous devons prôner la rationalité de l’État. Si l’État désire contrer les effets néfastes de certaines croyances religieuses, il doit mettre en place un système d’éducation et un programme de communication qui combattent systématiquement les croyances non fondées sur la raison, tout en respectant les gens qui partagent ces croyances. L’idée n’est pas de ridiculiser ces gens, mais de les convaincre que c’est une erreur de croire aveuglément à une soi-disant vérité qui n’est pas basé sur la raison. L’histoire et la science ont depuis longtemps démontré que la plupart des croyances religieuses sont sans fondement dans la réalité (c’est à dire sans fondement soi-disant « divin »). Alors il est temps que les politiciens oeuvrant dans un État rationnel le disent haut et fort, même si ce n’est pas « politically correct ». Avec le temps, les gens développeront alors une pensée critique et seront mieux à même d’évaluer la pertinence des idées véhiculées dans la société.

Intégrisme et sécurité à l’Assemblée nationale

2015-02-06

Ce matin, à la période des questions de l’Assemblée nationale, nous avons pu constater l’imbroglio entourant la réponse politique à donner à la question de l’intégrisme.

PQ

Le PQ demande au premier ministre de préciser sa position sur l’intégrisme, lui conseillant de se rallier à la position que celui-ci mène à l’extrémisme, comme l’a expliqué très clairement Zined El Rhazoui lors de son passage au Québec.

COMMENTAIRE: le PQ a parfaitement raison. Une doctrine religieuse dépeignant une fausse réalité est à la base des dérives menant à l’extrémisme, et éventuellement au terrorisme.

PREMIER MINISTRE

Le problème est la sécurité des québécois. C’est tout ce que la population demande et nous allons nous y attaquer, avec l’aide des organismes d’application de la loi.

COMMENTAIRE: le PM a tort. Dépeindre les québécois comme un groupe de personnes terrorisées attendant une intervention policière plus forte pour réprimer les actions terroristes est une simplification grossière du problème. C’est la fameuse approche de la peur, utilisée pour éviter de discuter sérieusement de problèmes complexes (une approche similaire est utilisée lorsque le sujet du référendum est abordé).

CAQ

On demande si le premier ministre entend mettre en place des mécanismes pour prévenir certains groupes de prêcher des valeurs qui vont à l’encontre des droits et libertés.

PREMIER MINISTRE

Le PM met en garde contre les interventions qui briment la liberté d’expression de quiconque, même si les idée avancées ne font pas l’affaire de plusieurs. Il souligne aussi l’approche négative du PQ, qui voulait exclure des citoyens sur la base de signes religieux et de choix de vêtements.

COMMENTAIRE: le PM a raison sur la question d’interdire l’expression de certaines idées. Une telle interdiction ne cadre pas avec la démocratie et la liberté d’expression, même si ces idées rebutent la majorité. Par contre, le PM a tort de ne pas considérer d’autres types d’approches. Il faut combattre les idées par les idées. Éducation dans les écoles et publicité sont des façons de contrer des idées et de développer un esprit critique chez la population pour prévenir la manipulation de l’esprit par des l’intégristes (voir un message précédent sur ce blogue). Cette approche a l’avantage d’offrir des outils pour se prémunir contre les manipulations indues de l’esprit, ou distortion de la réalité, même celles véhiculées par des religions qui ne prônent pas d’actions violentes. C’est probablement le poids politique de ces religions qui freine cette approche logique. N’oublions pas une chose: il faut toujours respecter les personnes, mais combattre les idées auxquelles nous nous opposons en utilisant tous les outils à notre disposition, particulièrement les idées qui déforment la réalité de façon évidente, que ces idées soient de nature religieuse ou non.

Pour ce qui est de l’interdiction des symboles religieux, le PM utilise encore une image forte, extrémiste, pour éviter la discussion sérieuse, même s’il a raison sur le fond: interdire les symboles et les vêtements a peu d’effet sur l’intégrisme, qui se situe au niveau des idées.

VICE sur HBO

2015-02-02

Pour ceux qui maitrisent l’anglais, l’émission d’information VICE diffusée sur HBO est un must pour avoir une vision du monde tout à fait unique. Les aberrations qui prennent place sur notre planète y sont exposées de façon exceptionnelle par une équipe de journalistes qui ne craint pas de plonger au cœur de l’action. Les reportages qui y sont présentés nous ouvrent les yeux sur des phénomènes de société qu’on a parfois peine à croire.

Un exemple parmi d’autres est le travail exceptionnel de la journaliste Tania Rashid au Bangladesh. Son reportage Toxic Tanneries expose ce que des gens doivent supporter pour satisfaire les besoins en articles de luxe de nos sociétés de consommation. Celui sur les Gang Rape expose ce que les femmes doivent affronter dans un pays dominé par les hommes… et l’islam. Rashid y confronte des policiers et se rend même à une mosquée où les femmes n’ont pas accès pour avoir une opinion sur le sujet du viol. Ils ont tous la même opinion : la femme est souvent responsable de ce qui lui arrive.

2015-02-04: Sex, slavery and drug

Le hameçonnage religieux

2015-01-19

Nous assistons présentement à diverses interventions de politiciens québécois concernant la nécessité ou non d’intervenir rapidement sur la neutralité religieuse de l’état, ainsi que sur la radicalisation. Ce sont deux choses distinctes, et certains préfèrent reporter la question de la neutralité religieuse à plus tard de peur qu’un lien soit établi entre celle-ci et la radicalisation, cette dernière étant, dans le contexte actuel, surtout liée à l’Islam. Bref, on ne veut pas que la neutralité religieuse de l’État soit perçue comme une tentative de bâillonner une religion en particulier.

Il convient alors d’être prudent dans le choix des mots. Les Français sont particulièrement habiles de ce côté. Par exemple, si vous vous retrouvez dans un train sans un ticket valide, le contrôleur vous dira que « vous êtes en situation irrégulière », un choix de mot qui n’implique pas automatiquement que vous avez commis une faute. Dans le cas de la radicalisation, on parlait récemment en France des « dérives sectaires liées à l’Islam », un choix de mots qui établit clairement le caractère unique des groupes radicaux par rapport à la religion dominante : il s’agit de sectes.

Les sectes sont généralement des communautés fermées où un ou des gourous exercent un pouvoir important, voir total, sur les membres de la secte. Le gourou définit la doctrine de la secte, c’est-à-dire qu’il fournit une interprétation de faits d’actualité, de faits historiques, et de l’histoire sacrée, et utilise cette interprétation pour orienter et diriger l’action des membres. Continuer la lecture…

Béliveau et Tremblay repêchés

En l’espace d’une semaine, Jean Béliveau et son ailier gauche Giles Tremblay sont repêchés par l’au-delà. Quelle équipe ils vont faire!

Ces joueurs sont ceux de ma jeunesse. Je suis né en 1955, quelques années à peine après La Soirée du Hockey. Entre 6 et 10 ans, il m’arrivait souvent de jouer au hockey le soir dans la rue avec des amis. C’était à Val-d’Or, alors les rues étaient de glace et le froid cinglant. Mais nous imitions nos héros. Parmi ces héros se trouvaient Béliveau et Tremblay, qui nous donnaient la force d’affronter n’importe quoi. Nous aimions particulièrement nous confronter aux « grands », les ados, frères de l’un ou de l’autre de mes amis. Les buts étaient faits de neige, mais les petits joueurs étaient invincibles.

Le prix du pétrole

Le prix d’un produit pétrolier, telle l’essence, dépend de plusieurs facteurs:

  • Cout du pétrole brut
  • Cout du transport à la raffinerie
  • Cout du raffinage
  • Cout du transport au lieu de stockage
  • Cout du stockage
  • Cout de la distribution aux points de vente

Le coût du brut influence grandement le cout total. Ce cout est exprimé en $US par baril. La composition du brut varie selon sa provenance, et tous les pétroles n’ont pas la même valeur. Les pétroles légers, de faible densité, sont de meilleure qualité que les pétroles lourds. De même, la présence de soufre dans un pétrole (dit corrosif) en diminue la valeur. Le « prix du pétrole » est une valeur de référence. En Amérique du Nord, ce prix de référence est le West Texas Intermediate (WTI), un brut léger non corrosif extrait en Oklahoma. Au niveau international, le brut de référence est le Brent de la Mer du Nord. Le véritable prix d’un brut particulier est souvent exprimé sous forme d’escompte par rapport au brut de référence. Par exemple (WTI – $5) signifie $5 le baril de moins que le prix du West Texas Intermediate.  Continuer la lecture…

Pétrole au Québec et écologie

Jean-François Lisée dévoilait aujourd’hui sa position à propos de l’exploitation pétrolière sur le territoire du Québec. Une position écologique qui dit non à l’utilisation de la fracturation hydraulique (considérée trop risquée dans l’état actuel de nos connaissances), et qui ne permettrait l’exploitation traditionnelle que dans les cas où ce serait avantageux du point de vue écologique par rapport à la situation actuelle (importation).

Le refus de l’OPEP de diminuer la production pour maintenir les prix à un niveau élevé a résulté en une baisse marquée du prix du pétrole dans les derniers mois, une stratégie visant à miner la rentabilité de la fracturation hydraulique aux États-Unis, une industrie maintenant florissante. Cette baisse de prix, si elle se maintient, mettra aussi en péril la croissance accélérée de l’exploitation des sables bitumineux an Alberta (voir rapport de Carbon Tracker), qui doit compter sur un prix élevé pour compenser la couteuse méthode d’extraction, de traitement et de transport de ce vil or noir. Avec un peu de chance, on pourrait assister à une baisse de l’engouement des sociétés pétrolières pour une surexploitation de la ressource par toutes les méthodes possibles, sans égard pour l’environnement.

L’engagement de Jean-François Lisée se heurtera sans doute au crédo économique qui veut que l’on « profite » à tout prix de cette manne que constitue le pétrole (emplois, redevances, etc.). Dans un contexte où la majorité des politiciens ne parlent que d’argent, chacun s’improvisant économiste et faisant miroiter un futur plein de richesses (du moins en période électorale, ce qui semble plaire à plusieurs), il est bon de constater que certains se souviennent que le bienêtre d’une population ne se résume pas seulement à la grosseur de son portefeuille. Continuer la lecture…

« Dieu bénisse le Canada »

Il y quelques semaines, j’entendais le premier ministre du Canada terminer son discours par un « Dieu bénisse le Canada », formule commune à nos voisins du sud (remplacer Canada par United States), mais relativement peu utilisée dans notre pays. Suite aux efforts déployés en 2013 au Québec pour affirmer dans une loi la laïcité de l’État, ce genre de déclaration fait frémir. Voici pourquoi.

Tout d’abord, il convient de mentionner que j’ai soumis l’an dernier un mémoire à la Commission des institutions dans le cadre de ce fameux projet de loi 60 (Charte affirmant les valeurs de laïcité…), ce qui m’a permis d’organiser certaines idées par rapport à la laïcité de l’État. Ce mémoire, en plus de commenter sur le bien-fondé des articles de loi proposés, soulevait une question qui, à mon avis, n’avait pas été suffisamment exprimée dans le projet de loi: l’objectivité et la rationalité de l’État.
Voici un extrait du mémoire à ce sujet: …Continuer la lecture…